Cette année-là, comme dans la chanson…
Isabelle Loredan est une auteure qui fait sa place dans le monde de la littérature érotique. Publiée aux Éditions Blanche et chez La Musardine, la qualité de ses récits n’est plus à démontrer. Je la sais pleine de projets en ce qui concerne l’écriture mais là, maintenant, tout de suite, je la remercie de m’avoir fait découvrir un jeu qui circule sur FB et fait appel tout simplement à la mémoire…
« On m’a attribué l’année 1980. Quoi en dire… j’avais à l’époque 14 ans et traînais mon ennui sur les bancs du collège. Je ne garde pas de très bons souvenirs de ces années d’adolescence, où j’étais mal dans ma peau, invalidée par une timidité quasi pathologique. Je me réfugiais dans la lecture. Quels auteurs ai-je découverts à ce moment-là ? Je ne m’en souviens plus. L’époque où j’ai écrit mes premiers vers, maladroits et convenus.
Les événements, qui m’ont marquée : l’assassinat de John Lennon, et la candidature de Coluche à l’élection présidentielle. Ce que je ne savais pas, c’est que ma grand-mère arrivait au bout du chemin. Mon plus grand regret aujourd’hui est de ne pas l’avoir plus questionnée sur sa vie, les épreuves qu’elle avait traversé. On est bête à cet âge-là, on croit que l’on a le temps… Illusion !
À celles et ceux qui likeront ce message, j’attribuerai une année. Ce sera alors à eux de raconter leurs souvenirs… »
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Octavie Delvaux
Auteur phare de la collection Osez des éditions de La Musardine, elle sort prochainement (toujours chez La Musardine), un livre que j’attends avec frénésie, ça s’appelle Sex in the Kitchen et il me tarde. (Je parle du livre, le sexe dans la cuisine, tu parles, je m’en suis pas privée !)
« À mon tour de me plier au jeu des années, dont je vous rappelle le principe : un ami FB vous propose une année au hasard, et, en retour de la lecture de son propre texte, vous fournissez un récit à propos de vous à cette date.
Lorsque Isabelle Lorédan m’a assigné l’année 1990, je me suis dit : mince, quoi de plus vide et plat que cette année ! Puis j’ai réfléchi, et, en me remémorant certains détails, il m’est apparu que si l’année 1990 fut en surface assez plate et morose, elle fut aussi déterminante et révélatrice des fondations de mon être intime…
Je m’explique : 1990 est l’année où je suis entrée au collège. Je sortais d’une école communale de « campagne », pour intégrer un collège privé de bonnes sœurs, beaucoup plus éloigné de chez moi. Dès les premier jours, j’ai commencé à haïr cet endroit où nous devions porter des blouses (du bleu marine pour les garçons, et du bleu plus clair pour les filles). La discipline était stricte, les professeurs sévères, la cantine abjecte, et les quantités servies dignes du goulag. Par-dessus le marché, nous devions desservir les tables et faire la vaisselle à tour de rôle. Bien que l’établissement fût mixte, tout était fait pour qu’en dehors des heures de classe, filles et garçons fussent séparés (nous avions des cours de récréations, des tables et des activités différentes etc…). Je tenais ce collège en horreur et vivais dans l’angoisse d’être « collée » (c’était à mes yeux la pire humiliation !) pour un livre oublié (j’étais déjà tête en l’air !) ou injustement réprimandée.
Je me souviens d’un fait marquant : le soir dans mon lit, j’aimais imaginer que tous les élèves se rebellaient. Nous ficelions (à moins que nous ne les clouions carrément ? Comme Jésus… je ne sais plus très bien), les bras en croix, nus, à la porte de leur salle de classe, et nous les fouettions, ou encore nous leur lancions des pierres et des fruits pourris.
Voilà une bonne transition pour passer au registre le plus intime de cette année 1990. Si ma mémoire est bonne, c’est aussi pendant cette année, que, tandis que des poils commençaient à pousser sur mon pubis, j’ai découvert la masturbation et le plaisir que je pouvais en tirer. À l’école, l’on nous avait fait lire « l’affaire Caius », un livre pour la jeunesse. Je ne me souviens plus du tout de l’intrigue, mais je me rappelle que l’histoire se déroulait pendant la Rome antique et avait pour héros un jeune garçon qui allait encore à l’école… Il devait y avoir dans le livre une scène de châtiment corporel, où alors c’est moi qui l’ai imaginée en lisant combien la discipline scolaire était stricte à cette époque… Toujours est-il que c’est en visualisant ces scènes de fustigation, qu’il m’arrivait de modifier au gré de mes fantasmes (plusieurs élèves romains étaient dénudés, attachés à des colonnades puis fouettés par des maîtres cruels), que j’ai commencé à découvrir l’effet que ces images produisaient entre mes cuisses. Après quelques frottements et gigotements malhabiles, j’ai enfin découvert mon clitoris ainsi que le moyen de le titiller pour parvenir à l’orgasme. À partir de ce jour, je devins une branleuse vorace, et, fait on ne peut plus révélateur, c’était toujours à des scènes de flagellation que je pensais pour faire monter le plaisir… La même année, j’ai vu pour la première fois le film Barry Lindon de Stanley Kubrick, qui, outre sa grande qualité cinématographique, comporte plusieurs scènes de « caning » tout à fait grisantes. Je me souviens de m’être glissée à plusieurs reprises, en pleine nuit, dans le salon de mes parents, pour repasser les fameuses scènes dans le plus grand secret (nous avions un magnétoscope, et je gardais précieusement la cassette par devers moi pour que ma mère ne l’efface pas par mégarde…) peut-être me masturbais-je en même temps, ou alors après… Je ne sais plus, mais je me souviens bien de la « marque » que ce film a imprimé sur mes fantasmes.
Qui s’étonnera alors qu’aujourd’hui mes textes soient si teintés de sadomasochisme ? Aussi étrange que cela puisse paraître, ce n’est pas par la pornographie ou par la lecture de magazines érotiques que j’ai découvert le plaisir charnel, mais par des scènes écrites, filmées, ou imaginées, totalement exemptes de sexe, et fortement connotées d’un point de vue SM…
C’est une discrète Octavie, productive et élégante, pour la retrouver c’est dans les livres chez La Musardine et un peu sur FB…
Aline Tosca
Ouais bon, c’est moi.
« Isabelle Loredan m’a attribuée l’année 1987… « Cet été-là j’avais 17 ans », ainsi commence Bonjour tristesse, le roman que j’ai adoré quand je l’ai lu, à cette époque. En 1987 je proposais un tout petit recueil de nouvelles à un éditeur parisien pas regardant sur la qualité, une première publication pour me faire plaisir, ça vaut ce que ça vaut ! Je ne lisais pas encore Duras mais plutôt Colette, les auteurs du début XX ème siècle, les anthologies de la littérature et je passais mon bac. J’aimais secrètement X qui avait doublé sa terminale et qui voulait devenir journaliste (il l’est devenu). X c’est un personnage important dans ma fantasmagorie, Isa ! Je lisais le manifeste et j’étais très engagée. Je n’ai jamais cessé d’avoir un regard aigu sur la politique. J’étais innocente, romantique, j’avais à peine goûté au flirt et j’écrivais des scènes langoureuses mais avec maladresse bien sûr. Moi aussi j’écrivais des poèmes d’adolescente Isabelle. Je marchais beaucoup, avec ma chienne, je l’emmenais à la plage tous les dimanches en hiver et sur le port. Je voyais mes ami(e)s et je lisais pendant les cours de sciences et de maths. J’ai aimé avoir 17 ans… »
Pour me suivre, vu que j’habite ici…