Le roman de Jauffret – Papa

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J’ai lu le roman de Jauffret. D’abord parce que c’est Jauffret. Ensuite parce que les livres qui mettent en scène des parents d’un genre que je ne connais pas me rendent curieuse.

La première fois que j’ai rencontré Jauffret j’ignorais juqu’à son existence d’écrivain.

J’ouvrais avec mon chef les grilles de l’école. On avait un point commun en plus du portail à ouvrir : les livres. Un matin à 7h40 il m’a dit : Jauffret, les Microfictions, ça te plairait. Depuis je m’emploie à lire ce romancier.

Ce roman est une quête, une recherche du temps perdu. Et une enquête en même temps qu’une interrogation (un interrogatoire ?) de la mémoire ici convoquée. Celle, personnelle, de l’auteur et celle, inhérente à la Seconde guerre. Ce qui me plaît dans ce livre qui se déroule comme un film, c’est ce point d’interrogation que l’on peut apposer après chaque souvenir. Est-ce que les souvenirs sont toujours vrais, est-ce qu’ils se distendent ? Quelle part de fiction l’écrivain distille-t-il en toute connaissance de cause ? Il est clair en revanche que les blessures de l’enfance sont parfaitement écrites, inscrites dans la mémoire.

En lisant ce roman, je pense à l’écriture de Flaubert et je pense aux Confessions de Rousseau, à Renan, aux Souvenirs d’enfance et de jeunesse. Jauffret écrit dans son livre  qu’il ne cherche pas à être moderne. Mais n’est-ce pas une forme de modernité que de s’inscrire dans la grande tradition des livres pérennes ?

Pour espérer réhabiliter le père, Régis Jauffret s’appuie sur un documentaire dans lequel il aperçoit celui-ci qui sort menotté de l’immeuble familial entre deux agents de la Gestapo en 1943. Son père était-il un héros silencieux ? Est-ce un montage de propagande ? Le fils raconte le Marseille de son enfance et mène l’enquête avec la minutie d’un détective et conjointement il caresse de la plume un père idéal, un qu’il construirait, dont il a envie, un avec lequel il puisse se réconcilier.

Et pourtant.

P.131 il écrit : « Alfred, suis-je né avec pour seule mission de te réparer. Les enfants viennent-ils au monde pour servir à leurs parents de médicament. »

P.132 il ajoute :  » Ne rien donner mais se gaver de son enfant comme d’un entremets. »

Il écrit surtout que « Seul le roman a le pouvoir de modifier ce qui a existé ». Sans doute dans cette phrase se trouve la clé de ce très bel opus, de ce livre-film dont on ne lâche la lecture que contraint par la page blanche qui suit le dernier mot.

Régis Jauffret, Papa, éditions du Seuil, 2020

 

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